Un nouvel appel des Pussy Riot

Des membres du groupe Pussy Riot demeurées en liberté lancent un nouvel appel à défendre la liberté d’expression artistique et politique en Russie et partout ailleurs, tout particulièrement en faveur des féministes, des lesbiennes et des gays (LGBT).

Elles ont enregistré à cet effet une véritable performance, mise en scène sur la ruine d’un bâtiment stalinien désaffecté. Le président de Russie y est pris à partie, sans jamais être nommé, à travers son portrait photographique, qu’elles brulent à la fin en lançant dessus un fumigène. Elles concluent en déclarant que « le combat pour la liberté est plus grand que la vie ». C’est-à-dire que la liberté de tous transcende la survie individuelle, et même celle de l’espèce. Aucune liberté authentique ne peut exister si nous ne sommes pas prêts à souffrir et mourir pour la défendre. Voilà qui résonne très justement avec La Légende du Grand Inquisiteur de Dostoïevski. Ce superbe texte prophétique est à méditer sans relâche aujourd’hui plus que jamais.

La relation très forte à l’image et à l’absolu, dont témoignent ici de très jeunes femmes russes, confirme la haute conscience qu’elles possèdent des valeurs spirituelles et donc politiques qu’elles portent et défendent ardemment. Le caractère populaire de leurs modes d’expression et leur capacité à leur donner une ampleur médiatique montre qu’elles transgressent les bornes de l’intelligentzia.

Cette vidéo, créée pour le prix de la chaîne musicale MTV, n’y a finalement pas été montrée au motif d’un litige sur le droit de reproduction.

A propos Pascal Rousse

Je suis docteur en philosophie, professeur certifié d'arts plastiques en collège à Paris et chercheur indépendant. Mes recherches en philosophie de l'art portent sur le cinéaste soviétique Serguei M. Eisenstein, le montage, la modernité et le modernisme.
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6 commentaires pour Un nouvel appel des Pussy Riot

  1. Etage41 dit :

    « La relation très forte à l’image et à l’absolu, dont témoignent ici de très jeunes femmes russes, confirme la haute conscience qu’elles possèdent des valeurs spirituelles et donc politiques qu’elles portent et défendent ardemment. Le caractère populaire de leurs modes d’expression et leur capacité à leur donner une ampleur médiatique montre qu’elles transgressent les bornes de l’intelligentzia. »

    Je profite de mon passage « en ligne » pour vous saluer, Pascal.
    Il faut – mais ce n’est qu’un avis – considérer le « où » plus que le « comment », en tout cas les mettre en rapport, en relation. Les mêmes actions, en France, par exemple, s’inscriraient dans un Spectacle, un happening plaisant ou non, sans risque autre que l’éventualité d’un échec, d’une communication ratée, voire du ridicule. Là – si l’on garde à l’esprit les nouvelles geôles, les procès modernes de Moscou, de cette Russie gouvernée par un ancien agent du KGB, en étroite relation avec l’ex-fameuse Stasi – il y a un courage certain à « risquer » sa jeunesse. Je ne peux qu’admirer ces jeunes volontés incarnées qui défie l’autoritarisme d’un Poutine comme d’autres, en d’autres temps, se sont défiés dans le même pays d’un « communisme » liberticide. Il faut encourager cette jeunesse, et ne pas lui laisser penser qu’on l’abandonne à son sort. Là ou ailleurs. Ailleurs où l’on meurt encore pour un simple mot, un simple geste…
    « Pussy » riot… J’ai toujours pensé que la liberté contenait en elle-même une grande charge érotique 😉
    Mon amitié.

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    • Pascal Rousse dit :

      Je suis entièrement d’accord : j’aurais pu, en effet, insister plus explicitement sur ce qu’implique le fait que les Pussy Riot sont russes. Vous rejoignez cependant mon intention, car c’est tout de même cela qui m’a inspiré le rapprochement avec Dostoïevski. Toutefois, il pourrait être possible de commettre en France, ou ailleurs en Occident, des performances artistiques risquées, en investissant par surprise des lieux publics ou de travail, par exemple. Les mouvements « Occupy » ont bien montré que le seuil de tolérance policière à une réappropriation libre des espaces publics par des citoyens est très bas, voire nul. Je suis étonné que les artistes ne se soient pas saisis de cette occasion et fussent finalement si domestiqués, si soumis à la demande d’autorisation ou à se cantonner aux espaces concédés par le pouvoir (donnant ainsi prise à la logique de la concurrence !).

      Quant à l’érotisme intrinsèque à la liberté : mille fois oui ! On le voit aussi avec les Femen d’Ukraine (encore l’Est post-communiste !), bien sûr. J’ai vraiment beaucoup d’admiration pour ces femmes, belles de leur liberté, de leur courage et de leur grande intelligence. Je pense que le fait qu’elles soient plus visibles que d’autres ne sert pas seulement leur cause, mais aussi celles des autres moins visibles. Je ne suis pas d’accord avec ceux qui critiquent à ce sujet l’engouement pour les Pussy Riot. D’autant qu’elles ne se contentent pas de s’opposer au pouvoir pour telle ou telle question de détail, mais elles se situent d’emblée consciemment dans l’universel et elles le disent. Après tout, le patriarcat, contre lequel elles luttent toutes en tant que féministes, et parfois bisexuelles et lesbiennes, est quand même le fondement du pouvoir en général, y compris dans le domaine économique, dans le monde.

      Merci infiniment pour votre amitié à laquelle répond la mienne.

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      • Etage41 dit :

        Bonjour Pascal. Oui, vous avez raison.
        Un peu hors-sujet mais pas tant que ça : l’appellation « plan vigipirate » en dit long… Ils auraient pu l’appeler « plan vigiterroriste », hein, mais non, le « plan vigipirate » est un plan large qui autorise bien des interdits et interdit bien des autorisations au motif que tout rassemblement est un risque en soi…

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      • Pascal Rousse dit :

        À cela s’ajoute une surprenante capacité acquise à intérioriser les limites qui nous sont assignées comme d’indépassables nécessités.

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  2. lalbatross dit :

    Reblogged this on Digital Curiosities and commented:
    Puisque je suis ssensible à la cause des Pussy Riot (pour ceux qui ne connaissent pas, lisez à ce sujet), je voulais vous présenter cet article d’un autre bloggeur.

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